Claire Deguelle

L'art de faire demi-tour en randonnée

Claire Deguelle
L'art de faire demi-tour en randonnée

La randonnée est un moyen de faire de l'exercice majoritairement sécuritaire, il existe néanmoins des situations où faire demi-tour est une nécessité pour notre sécurité.

Tout d’abord, pourquoi refusons-nous parfois de faire-demi-tour ?

Car il est parfois plus long de faire demi-tour que de passer l’obstacle qui est devant nous.

Car faire demi-tour est souvent vécu comme un échec et notre égo nous pousse à continuer, surtout quand on a un objectif précis en tête, et qu’on se prépare pour l’atteindre depuis un moment. On est tellement investi émotionnellement que la raison est passée sous silence.

Car on est trop optimiste (ou trop fatigué) et qu’on refuse d’analyser la situation avec franchise : Le passage n’est pas si difficile, la météo n’est pas si mauvaise, j’y suis presque, …

Il est donc important de savoir quand, comment et où faire demi-tour. Il en va de votre sécurité, de celle de vos accompagnateurs et même de celle des sauveteurs. Un sauvetage en région éloignées peu prendre des heures et mettre la vie des autres en danger. Donc si vous ne le faites pas pour vous, faites-le au moins pour les autres !

Quand, où, pourquoi faire demi-tour ?

Suivre la météo

Nous avons tous été témoin de changements rapides de la météo lors d’une randonnée. Il est peut être même arrivé à certain d’entre vous d’être passé par les extrêmes : Grand ciel bleu suivi d’un orage violent, agrémenté de grêle et d’une diminution drastique de la visibilité. Si cela est ennuyeux en été, cela peu être carrément dangereux en hiver. Les bourrasques de neige recouvrent les traces et la visibilité devient de plus en plus réduite augmentant les risques de se perdre et les risques d’hypothermie.

Écouter son corps

Certain sont maîtres dans l’écoute de leur corps et rebroussent chemin à la moindre petite ampoule, d’autres se foulent la cheville ou se tordent le genou et décident tout de même de continuer…

Rappelez-vous qu’une blessure, même mineure peut s'avérer problématique dans des conditions hivernales. Des arrêts plus fréquents augmentent le risque d’hypothermie et celle-ci augmente les chances de chutes ou de glissades. De plus l'hypothermie peut être difficile à détecter en soi-même … et une hypothermie légère peu rapidement se transformer en gelures ou hypothermie grave. Alors écoutez votre corps et acceptez de faire demi-tour.

Rester au sec

Si vous tombiez dans un ruisseau glacé, vous rebrousseriez chemin ? Pourtant certain continuent leur chemin avec des vêtements ou des chaussures trempées, alors qu’il est impossible de se réchauffer complètement avec des affaires mouillées.

Il n’est pas nécessaire de tomber dans l’eau pour se retrouver trempé, la transpiration générée durant la randonnée et parfois amplement suffisante. Surtout en raquette dans la neige profonde, nous pouvons générer beaucoup de chaleur et de sueur, et lorsqu’on s’arrête, on se refroidi extrêmement rapidement. Donc si vous vous retrouvez mouillé par votre propre sueur, changez-vous avec des vêtements secs ou faites demi-tour dès que possible.

Compter les heures

Comptez les heures avant le coucher du soleil, surtout en période hivernale où le soleil se couche très tôt et où les conditions météo ne permettent pas de garder une cadence soutenue. Planifiez votre sortie en conséquence, commencez le plus tôt possible et accordez-vous un délai d'exécution précis. Ces sentiers que vous aimez en été pourraient ne pas être réalisables un jour d'hiver.

Refuser la tentation

Un grand nombre de randonneurs aime escalader les rochers, monter au sommet des cascades, sortir du sentier, … Ils se mettent à grimper sur des parois qui semblent faciles au départ, sans l'équipement approprié. Une fois qu’ils comprennent à quelle hauteur ils sont rendu, ils se mettent à paniquer. Ils se retrouvent coincés et commencent à se refroidir.

Ne succombez pas à la tentation. Trop de personnes doivent être secourues, sont gravement blessées ou souffrent d'une chute mortelle après avoir grimpé des sommets sans l'équipement et le niveau de compétence appropriés.

N'oubliez pas qu'il est toujours plus facile de monter que de descendre, et mieux vaut faire demi-tour que d'être évacué sur une civière!

Manquer d’eau

L’hydratation est souvent négligée alors qu’elle est tout aussi importante en hiver qu’en été. Assurez-vous toujours de transporter suffisamment d'eau avec vous. En fait, vous ne pouvez jamais avoir trop d'eau. Vous pouvez même vous hydrater la veille de votre randonnée. Connaissez les signes de déshydratation et n’hésitez pas à abandonner votre objectif si vous n’avez plus d’eau. En étant déshydraté, les maux de tête apparaissent, notre cerveau ne fonctionne plus à pleine capacité et c’est ainsi que débute les chutes et la chaine des mauvaises décisions. A cela peuvent s’ajouter des crampes aux mollets, aux cuisses ou aux orteils … Crampes au corps et au cerveau, le parfait duo pour se mettre en danger.

Posez-vous les bonnes questions

Alors que vous vous tâtez à faire demi-tour, voici quelque questions que vous pouvez vous poser :
- Mes chances d'être gravement blessé augmentent-elles si je continue la randonnée?
- Ai-je le bon équipement avec moi au cas où je resterais bloqué?
- Combien d’heures reste-t-il avant la noirceur?
- Combien de nourriture et d'eau est-ce qu’il me reste?
- Est-ce que quelqu’un sait exactement où je me situe si je reste coincé?

Rappelez-vous …

Il vient toujours un moment dans la vie d’un randonneur, où il doit se poser la question de continuer ou de faire demi-tour … Revenir en arrière peut être très démoralisant sur le coup mais ce ne sera jamais une mauvaise décision. Il est préférable de jouer la sécurité, de plus la montagne sera toujours là dans une semaine ou même un an.